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Photo du rédacteurBenjamin ROLLAND

Publication SUAL dans le JMIR: habitudes à risque addictif lors du début de confinement


La crise internationale du COVID-19 a amené de nombreux pays à mettre en place des mesures de confinement très strictes. Beaucoup ont fait l’hypothèse que cet enfermement brutal des populations allait accroitre les habitudes à risques addictifs, telles que la consommation de nourriture salée, sucrée ou grasse, l’usage d’écrans et bien sûr les prises de substances. De très nombreuses enquêtes ont été menées, avec des succès divers.


Dans les jours qui ont suivi le confinement, le Centre Ressources Réhabilitation (CRR) a mis en place une enquête en ligne qui a rencontré un franc succès, avec plus de 30 000 participants au cours des semaines qui ont suivi le 17 mars, 1er jour du confinement en France. Ici, nous n’avons pris que les données issues des quinze premiers jours, pour évaluer les changements globaux précoces et les facteurs associés aux augmentations dans les différents types d’usage évoqués au-dessus. Cette enquête a ainsi rassemblé 11 391 participants recrutés entre le jour 8 et le jour 13 du confinement.


Les questions ont porté sur des informations sociodémographiques, les conditions matérielles dans lesquelles les sujets étaient confinés (dans quel type de logement, quelle superficie, avec ou sans accès extérieur privé, en télétravail, travail réel, chômage partiel ou autre, avec combien de personnes…). D’autres questionnaires ont exploré le niveau de stress global et de bien-être psychologique, avec l’échelle connue et validé Warwick-Edinburgh Mental Well-Being Scale (WEMWBS). Les évolutions récentes d’usages de substances, de nourriture et d’écrans ont également été observées. Les facteurs d’augmentation de toutes ces habitudes ont été modélisés avec des outils de régression logistique.



D’une manière générale, au cours de la phase précoce du confinement, les augmentations d’habitudes à risque addictif ont été beaucoup plus importantes que les diminutions (voir graphique au-dessus). Ainsi, la pratique des écrans a explosé, sans que l’on puisse dire précisément dans cette étude s’il s’agissait d’un usage professionnel (télétravail par exemple) ou bien d’un usage pour meubler l’ennui et l’enfermement.

Les principaux facteurs liés à une augmentation de la consommation alimentaire étaient le fait d’être une femme, d’être âgée de moins de 49 ans, d’être confinée seule dans un espace plus étroit et d’avoir des antécédents actuels ou passés de troubles psychiatriques.

Pour les écrans, les facteurs de risque étaient le fait d’être une femme, d’être âgée de moins de 29 ans, de ne pas avoir de partenaire, d’avoir un niveau d’études intermédiaire ou élevé, d’être professionnellement active, en télétravail et confinée en ville sans accès à un espace extérieur.

Pour le tabac, c’était également le fait d’être une femme, de ne pas avoir de partenaire, d’avoir un niveau d’éducation bas ou intermédiaire et de travailler toujours sur site.

Pour l’alcool, l’augmentation était davantage rapportée dans la classe d’âge 30-49 ans, chez des personnes avec un niveau supérieur d’éducation ou chez des individus avec problèmes psychiatriques concomitants.

Pour le cannabis, le principal facteur d’augmentation était le fait d’avoir un faible niveau d’éducation.


Ces données valent ce qu’elles valent. Elles fournissent des tendances grossières de comportements auto-déclarés. Néanmoins, elles portent sur de très nombreux sujets et l’enquête a été menée à un moment où les participants n’étaient pas encore sursollicités pour participer à des enquêtes en ligne. Les résultats révèlent probablement l’intense stress lié au confinement et les mesures adaptatives mises en place par la population, notamment sur les habitudes de vie. Le stress découlait probablement de la situation sanitaire nationale, hystérisée par les chaines d’information et les chiffres de morts fournis avec générosité, mais aussi aux brutales adaptations que le confinement a imposé dans la vie de la plupart d’entre-nous, la promiscuité familiale, l’interpénétration constante entre tâches ménagères, garde des enfants, télétravail et sûrement bien d’autres facteurs.

D’autres analyses des données de cette enquête suivront pour dire si la fin du confinement a permis une normalisation ou s’est traduit au contraire par le maintien d’habitudes de vie de plus mauvaise qualité.


Article original : Benjamin ROLLAND;  Frédéric HAESEBAERT;  Elodie ZANTE;  Amine BENYAMINA;  Julie HAESEBAERT;  Nicolas FRANCK. Global changes and factors of increase in caloric/salty food, screen, and substance use, during the early COVID-19 containment phase in France: a general population online survey.

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